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Le Refuge

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9 octobre 2009

1980 – Elle a 19 ans la fille aux yeux tristes

En mars, Marguerite Yourcenar est la première femme élue à l'Académie française.

La deuxième année ne se termine pas comme elle a commencé. Les grèves enflamment le campus. Les AG se multiplient menées par les étudiants trotskistes et une étrange faune faite de zombies qui n’ont pas du fréquenter la moindre école ou fac de leur vie… des grèves de la faim sont organisées… les bâtiments administratifs sont saccagés

Elle regarde tout cela avec curiosité sans réellement s’y engager..

Elle poursuit frénétiquement à lire tout ce qui est considéré comme une œuvre majeure pour l’humanité. Elle se passionne pour la philosophie. Bergson et Alain lui ouvrent d’autres horizons. Krishnamurti la persuade qu'un changement fondamental dans la société ne peut émerger que d'un bouleversement radical dans l'individu…

Bernard Kouchner crée Médecins du monde.

Elle adhère à Amnesty International.

Bien que plutôt mignonne sa vie affective, est à l’image du désert de Gobi. Certains garçons tentent de l’approcher mais c’est le mur de Berlin. Sa virginité lui pèse pourtant et la renvoie inlassablement à cette timidité maladive et ce complexe qui fait qu’elle ne sentira jamais mignonne. Son avenir sentimental la taraude. Elle finira seule c’est certain.

Elle passe les deux mois d’été en Angleterre dans une pension de famille à Hastings. Le fils de la famille tentera de sortir avec elle. Mais elle se réfugie dans son manque de maîtrise de l’anglais pour faire celle qui n’a rien compris. L’Angleterre est un havre de paix où elle poursuit ses lectures et fait de longues balades en solitaire bien entendu.

A Londres où elle passe quelques jours, elle reprend une grand claque dans les gencives : Un vieil homme le  crâne luisant au-dessus d’une couronne de cheveux blancs, s’extirpe d’une Jaguar grise à rallonge, la bouche difforme comme après un infarctus. Une femme ressemblant à un pruneau le suivit. Tous deux paraissent avoir dépassé les cent ans et portent quelques dizaines de milliers d’euros transmutés en fringues. Quelque chose en eux la troubla. Pas le fait qu’ils étaient vieux et desséchés. Ce n’était pas seulement ça. On parle de gentils petits vieux mais ces deux-là n’avaient absolument rien de gentil. Ils avaient le regard méchant, des gestes crispés, coléreux et craintifs. La vie les avait vidés, les avait dépouillés de toute bonté, de tout espoir, ne leur laissant qu’une espèce de hargne rageuse. Ils n’étaient plus qu’amertume

- Salope (en français)  ! marmonna le vieux à travers son rictus permanent en la zyeutant de la tête au pied… sans raison apparente.

A la rentrée, c’est sa troisième année qui commence. Elle a choisit une spécialité nouvelle : le génie énergétique que la crise pétrolière de 1976 a mis à la mode. Elle sera rapidement major de sa promotion.

En cette fin d’année 1980 un attentat antisémite a lieu contre la synagogue de la rue Copernic à Paris.

Heureusement, Coluche annonce au journal télévisé sa candidature à l’élection présidentielle.

La vie est ce qu'elle est, un peu de sourires, quelques grincements de dents. Il faut la prendre comme elle vient.

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8 octobre 2009

1979 – Elle a maintenant 18 ans, la fille aux yeux tristes.

L’année commence comme la suivante s’est terminée.

Rien de détonnant en France non plus dans l’actualité.

Elle poursuit ses études sans réelles difficultés scolaires. C’est plus un problème de socialisation qui est le sien. Beaucoup de solitude. Beaucoup d’angoisse de n’être pas comme les autres – ce terrible complexe qu’elle porte comme une chape de plomb.

Elle commence à avoir même un comportement déviant vis-à-vis de la nourriture dans sa phobie de manger seule à la cantine au milieu de la foule, des groupes d’amis, des clans où elle n’a aucune place. Dans les rues, elle achète et se gave à toute vitesse de pommes ou de gâteaux puis se fait vomir…

Sublimation du mal-être ? Elle décide de tous lire en partant de la Bible, Ovide, Virgile, Saint-Augustin pour arriver à Bergson, Sartre, Camus, Beckett, Beauvoir, Sand, Balzac, Zola, Flaubert, Vian… et en passant par Voltaire, Descartes mais aussi Marx, Nietsche, Hegel, Heidegger…. Une œuvre majeure de chaque auteur. Elle s’accroche même si parfois elle doit relire trois fois certaine page du Capital pour y comprendre quelque chose. Ces neurones tournent à plein. L’effet de tout cela est au-delà du thérapeutique, le temps passé à lire se transformant en une sorte de caisson de décompression émotionnelle, histoire d’éviter que le cerveau n’éclate quand il allait soudain réémerger dans le monde réel.

En cette fin de première année, il y a un stage « ouvrier » à réaliser. Elle trouve quelque chose dans une usine d’électroménager. Elle y vit le travail à la chaîne. Cette aliénation des individus au travail où le corps devient robot et exécute des milliers de fois le même geste sans comprendre sa raison d’être (Ah ! ce cher Taylor). Atelier de femmes en majorité où parler et aller faire pipi sont interdits durant des heures tuantes. Un jeune homme, apprenti régleur semble s’intéresser à elle. Il l’a même inviter à boire un verre. Mais un jour il oubliera de remettre la sécurité sur la presse qu’il réglait et y perdra la main droite. Elle aurait pu aller le voir à l’hôpital. Mais elle ne l’a pas fait car elle a appris que les ruptures sont inéluctables.

D’ailleurs, elle ne sait pas ce qu’il faut faire avec les garçons.

A l’école, une fois un voisin de palier lui à glisser sa cuisse entre les siennes par derrière, dans la file d’attente pour aller au réfectoire. Une autre fois, en cours, un autre garçon lui a posé la main sur la cuisse… mais elle ne sait pas répondre à ces gestes. L’éventuelle suite à donner l’effraie plus qu’autres choses. Elle se sent gourde avec les garçons. Elle sait qu’elle est plutôt pas mal maintenant qu’elle a perdu 17 kilos mais elle se sent encore grosse à l’intérieur. Elle a une allure un peu garçonne qui pourrait sûrement plaire. Mais toute idée de flirt, de drague la paralyse.

La deuxième année commence comme la première même si elle trouve un peu plus ses marques dans cet univers.

Pourtant elle s’est fait traiter de « cloporte » par une fille de sa classe. Elle a été fracassée par l’attaque. La  fille l’a démolie jusqu’aux os par cette insulte.

Mais depuis qu’elle a trouvé un poids « normal », elle a découvert qu’elle était plutôt douée en sport. La fille en question s’est prise et tout sauf par hasard, le ballon en pleine poire durant le match de handball – petite vengeance qui s’est terminée à l’infirmerie pour l’autre..

De temps en temps elle partage son statut de paria avec une inadaptée sociale au sang bleu Emmanuelle de G. qui dénotait du reste des étudiants par ses manières d’un autre temps et ses opinions à droite de l’extrême droite qui pourraient semer l’épouvante. Bien qu’elle-même, soit plutôt une franche sympathisante de gauche, elle s’est fait traiter à plusieurs fois de « fasciste » ou de « nazi » dans les couloirs à cause de cette nouvelle amie. Insultes qui l’a meurtrissent tellement c’est injuste. Leur alliance a été un boomerang. C’était elle qui avait lancé l’idée et, depuis, elle ne cessait de se reprendre cette nouvelle amie en pleine gueule.

En cette fin d’année 1979, le Canard enchaîné révèle l'affaire des diamants de Bokassa mettant en cause le président Giscard d'Estaing.

Le ministre du travail Robert Boulin, est retrouvé mort dans la forêt de Rambouillet.

Et l’« ennemi public numéro un », Jacques Mesrine est tué par des policiers.

La vie n'est pas triste. Elle a des heures tristes.

6 octobre 2009

1978 – Elle a 17 ans, la fille aux yeux tristes.

1978 –  Elle a 17 ans, la fille aux yeux tristes.

C’est un début d’année où l’on voit le baron Empain se faire enlever, où  l’Amoco Cadiz  répand son chargement toxique sur nos côtes et où Cloclo quitte ce monde.

Mauvais auspices ?

C’est les derniers mois au village où elle se perdait en balades solitaires. Ses parents ont fait construire une maison en ville où elle n’aura pas de chambre à elle, contrairement à sa sœur cadette. Mais elle s’en fout. Elle n’aimera jamais cette maison.

C’est aussi la fin des années au lycée. Elle a été collée le dernier samedi pour la première fois en huit ans. Elle est rentrée trop tard, après la fermeture des portes de l’internat ce dernier mercredi, jour de sortie autorisée. Elle est fière c’est la première fois qu’elle sort de son image de petite fille bien sage. Pas d’adieux, pas de promesses de se revoir avec ses copines qu’elle connaît pourtant depuis tant d’années. Elle n'est pas forte pour maintenir les relations à distance. Et elle est habituée aux ruptures depuis si longtemps.

En juin, l’Argentine est championne du monde de football chez elle. La France ne sort pas de son groupe de qualification. Dommage car elle adore le foot, le Racing Club de Lens et Michel Platini.

C’est l’année du bac – elle révise dans le grenier – elle en fait probablement une crise d’asthme qui l’empêche de dormir avant les épreuves mais elle a son bac avec mention comme elle s’y attendait.

Elle passe ses vacances d’été en camping avec sa famille et des amis – c’est une période de grande solitude et de souffrance – elle a le sentiment d’être anormale, vilain petit canard rejeté de la bande vers qui elle n’a pas la force de faire un pas et qui ne fait rien pour l’aider à en sortir – elle en fait des insomnies.

Septembre, entrée dans une école d’ingénieur que son père lui a choisit – angoisse de l’inconnu. Elle découvre sa nouvelle cothurne – Olivia C. avec qui elle passera 5 ans à l’école. Son antithèse en quelque sorte et qui sera finalement une de ses meilleures copines.

Depuis quelques mois elle fait un régime d’enfer et perd 17 kilos. Précieuse victoire sur un corps gavée de cortisone depuis plus de 11 ans, et dont elle a honte. Celle que l’on surnomme méchamment « la grosse » gardera à vif, la cicatrice de ses complexes, qui ne s’effacera pas de si tôt. Elle doit avoir des carences alimentaires car elle a mal aux genoux et a de la peine à rester debout pendant les cours de gym.

Elle rentre toutes les semaines chez ses parents par le train corail. Deux heures d’ennui chaque vendredi après les cours et chaque retour le dimanche soir. C’est à chaque fois la même angoisse.

Sa mère, dans un rituel peut-être déculpabilisant lui fait un « marbré » au chocolat pour la semaine. C’est si rare un geste affectueux de la part de cette mère qu’elle dévore toujours le gâteau dès le premier soir en rentrant à l’école. Elle a peur de se retrouver seule à la cantine du campus – toujours ce sentiment lancinant de ne pas être normale. La honte, d’être seule, différente des autres, en groupes, intégrées, bien dans leu peau.

En cette fin d’année, l’ayatollah Khomeiny trouve refuge en France.

Alain Colas disparaît dans la Route du Rhum.

C'est toujours dans les yeux que les gens sont les plus tristes. 

2 octobre 2009

T’aimer !

50699466_1_T’aimer ! Et quand le jour timide renaît, entendre, en s’éveillant, derrière les fenêtres, les doux cris jaillissants et dispersés des oiseaux.

T’espérer ! Et sentir que l’océan exhale ses soupirs bleuâtres vers le ciel libre et clair.

Et t’attendre ! En goûtant cette impudique ivresse de songer, à ton regard voilé d’amour, à tes bras nus, au doux vol de nos caresses semblables aux chauds rayons du soleil !

25 septembre 2009

Les marches tièdes

Elle était venue sur les marches tièdes de l’église et s’était assise.

Son joli visage était incliné un peu de côté ;

Ses mains assemblées étaient endormies au creux de sa jupe ;

Et elle croisait ses jambes dorées devant elle, l’un des pieds nu pointant vers le ciel.

J’ai du frôler ce pied pour passer et je l’ai vue.

Sa taille me donnait envie d’être face à elle dans ces danses où l’on est accolé et où il faut qu’on se colle plus qu’on n’oserait.

La ligne de son épaule me donnait envie de l’envelopper dans un tendre châle.

Mais le désir me vint de regarder sa bouche et ce fut le départ de tout.

Mais le besoin me vint de rencontrer ses yeux et ce fut la cause de tout.50377369_1_

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24 septembre 2009

Le baiser

50692059_1_Comme une ville qui s'incendie parce que le soleil vient de l’embraser, tout mon cœur brûle et se consume, j’ai soif, oh ! j’ai soif d’un baiser.

Baiser de la bouche et de la langue où notre amour vient se fondre, plein de délices et d’émotions, Ah ! j’ai soif, j’ai soif d’un baiser !

Baiser multiplié que rien ne pourra jamais épuiser, Ô toi, que tout mon être désire, j’ai soif, oui, j’ai soif d’un baiser.

Fruit sucré où la lèvre s’amuse, beau fruit qui joue à être savouré qu’il se donne ou qu’il se refuse, je veux vivre pour ce baiser.

Baiser d’amour qui règne et bourdonne au cœur battant à se briser, qu’il se refuse ou qu’il se donne, je veux mourir de ce baiser.

23 septembre 2009

Rien ne meurt.

50527856_1_Le nuage se transforme en pluie, tombe dans le fleuve, ou dans la mer ou dans les prés, il ne meurt pas. Il continue sous une autre forme. Quand il se mêle à l’eau qui coule, il continue de changer.

De la même façon, une feuille de papier ne peut être réduite à rien. Même si on la brûle, elle continuera sous d’autres formes. Une partie de la feuille va s’élever vers le ciel sous la forme d’une fumée et faire partie d’un nuage. Une autre partie va devenir l’énergie de la chaleur. Une autre partie encore va se transformer en cendres qui tombent par terre, se mêlant au sol. Dans quelques semaines, ce papier pourrait se manifester sous la forme d’une petite fleur dans l’herbe. Qui sera capable de reconnaître sa présence ?

Rien ne meurt.

18 septembre 2009

Nous voulions

50698380_1_Nous voulions un amour aussi grand que notre rêve,

Et notre rêve, pourtant, embrassait l'infini ;

En nos cœurs, l’idéal était nos prénoms chéris

Et nous le répétions tendrement et sans trêve.

50698367_1_Nous voulions un amour sensible et doux comme la brise,

Caressant et berceur comme un chant dans la nuit ;

Nous rêvions du baiser ardent qui séduit,

Du contact de la chair qui étourdit et qui grise.

50698377_1_Nous voulions un amour sans fin comme l'éternité !

Fort comme un océan pour porter nos deux âmes ;

Clair afin que le soleil puisse y mirer ses flammes ;

Et l'agrandir encore de son immensité !

50698378_1_Nous voulions un amour exclusif et trop fort,

Trop sincère et trop lourd pour les forces humaines ;

Pour l'étreindre, il aurait fallut abandonner nos chaînes

Et nous ne le pourrons jamais que dans la mort ! 

17 septembre 2009

Scène ordinaire de la rue parisienne vue d’une fenêtre de bus,

Un homme, une femme à la queue leu leu  sur le trottoir, lui devant, elle derrière à deux mètres. Il a dix ou vingt ans de plus visiblement. Elle porte un cabas trop lourd. Elle s’arrête pose le cabas par terre et hurle quelque chose à l’homme devant qui lui répond en criant aussi. Il ramasse le cabas avec lequel il la frappe de toutes ses forces au visage. La tête heurte le mur de pierre de l’immeuble voisin. Elle a mal. Elle pleure. Elle ramasse le cabas. Ils repartent.

Mais d’où vient cette violence ?

D’une enfance brisée ?

Des tréfonds de la génétique ? 

Certes nous avons tous, un fond de violence en nous.

Certes nous créons tous, un monde plein d’illusions, ce qui nous fait souffrir dans notre vie de tous les jours.

Notre conscience construit et imagine sans relâche toutes sortes de choses.

Nous scindons tous la réalité en parties distinctes : « ceci est différent de cela » ; «  je ne suis pas toi » ; Nous discriminons – soi et autrui, aller et venir, naissance et mort. Nous avons tous tendance à vivre notre vie à la lumière des constructions imaginaires qui augmentent notre souffrance.

Avec ce genre d’imagination et de discrimination, nous produisons tous de la souffrance, le cercle vicieux de la souffrance et des illusions.

L’enfer est construit un peu par nous tous.

Mais nous ne passons pour la plupart pas à l’acte comme cet homme. 

50693757_1_Pourtant quand des gens prêts à passer à l’acte se rassemblent, le monde qu’ils créent s’appelle l’enfer. 

15 septembre 2009

Prise de conscience

50707709_1_Les cellules de notre corps meurent à chaque instant pour faire place à de nouvelles cellules.

La paroi de l’estomac se renouvelle entièrement tous les jours.

Si nous organisions des obsèques chaque fois qu’une cellule meurt, nous passerions tout notre temps à larmoyer et nous n’aurions plus de temps pour faire autre chose.

Nous mourons et nous renaissons donc à chaque instant.

C’est une erreur de penser que nous avons encore 10, 20 ou 50 ans à vivre avant de mourir. En fait, nous mourrons à chaque instant.

C’est également une erreur de dire que nous sommes nés, il y a 20, 30 ou 50 ans. En fait, nous naissons à chaque instant.

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